Description
Poème autographe signé. S.l.n.d. ; 1 pages in-8° oblongue
Quatrain autographe signé, encre brune pâlie, contrecollé sur page cartonnée, 14,8 x 22,5 cm.
L’un des plus célèbres quatrains du grand poète, proscrit, qui par ses vers souffle le vent de la révolte contre l’empereur Napoléon III, suite à sa prise du pouvoir par la force, lors de son coup d’Etat du 2 décembre 1851. Il s’agit du dernier quatrain d’un poème de huit, intitulé Ultima verba, publié en 1853 dans le recueil Les Châtiments, livre septième, Les sauveurs se sauveront – XVII :
« Si l’on est plus de mille, eh bien, j’en suis ;
Si même ils ne sont plus que cent, je brave encore Sylla ;
S’il en demeure dix, je serai le dixième ;
Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là ! Victor Hugo »
Violent pamphlet contre Napoléon III, qui par son coup d’Etat du 2 décembre 1851, a piétiné la République dont Victor Hugo était un des plus dignes représentants. Ancien député, il n’accepte pas que cet usurpateur vienne mettre à bas la république. Il se déclare d’emblé comme le chef de fil des proscrits. Il part à Bruxelles avec sa maîtresse Juliette Drouet, le 11 décembre 1851, rejoint sa famille à l’île de Jersey, puis de là, s’installe définitivement à Guernesey. Sur son île il n’aura de cesse de calomnier le nouvel empereur qu’il qualifie du sobriquet de Napoléon le petit, faisant ici allusion à son illustre prédécesseur Napoléon 1er le grand. L’année d’après, le nouvel empereur bannit les opposants par décret du 9 janvier 1852. Dans ce poème, le poète a la volonté inaltérable de ne pas céder et de ne pas retourner en France tant que l’usurpateur sera sur son trône. Il tiendra parole et ne reviendra de son exil que le 5 septembre 1870, après la défaite de Sedan, et ce malgré la loi d’amnistie des proscrits du 16 août 1859.
XVII – Ultima verba
Du vers 36 à la fin
Mes nobles compagnons, je garde votre culte
Bannis, la république est là qui nous unit.
J’attacherai la gloire à tout ce qu’on insulte
Je jetterai l’opprobre à tout ce qu’on bénit !
Je serai, sous le sac de cendre qui me couvre,
La voix qui dit : malheur ! la bouche qui dit : non !
Tandis que tes valets te montreront ton Louvre,
Moi, je te montrerai, césar, ton cabanon.
Devant les trahisons et les têtes courbées,
Je croiserai les bras, indigné, mais serein.
Sombre fidélité pour les choses tombées,
Sois ma force et ma joie et mon pilier d’airain !
Oui, tant qu’il sera là, qu’on cède ou qu’on persiste,
Ô France ! France aimée et qu’on pleure toujours,
Je ne reverrai pas ta terre douce et triste,
Tombeau de mes aïeux et nid de mes amours !
Je ne reverrai pas ta rive qui nous tente,
France ! hors le devoir, hélas ! j’oublîrai tout.
Parmi les éprouvés je planterai ma tente.
Je resterai proscrit, voulant rester debout.
J’accepte l’âpre exil, n’eût-il ni fin ni terme,
Sans chercher à savoir et sans considérer
Si quelqu’un a plié qu’on aurait cru plus ferme,
Et si plusieurs s’en vont qui devraient demeurer.
Si l’on n’est plus que mille, eh bien, j’en suis ! Si même
Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla ;
S’il en demeure dix, je serai le dixième ;
Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là !